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Winter Bell

english translation

Winter Bell

original French poem

La Cloche fêlée

La Cloche fêlée

II est amer et doux, pendant les nuits d'hiver,
D'écouter, prèsdu feu qui palpite et qui fume,
Les souvenirs lointains lentement s'élever
Au bruit des carillons qui chantent dans la brume.

Bienheureuse la cloche au gosier vigoureux
Qui, malgré sa vieillesse, alerte et bien portante,
Jette fidèlement son cri religieux,
Ainsi qu'un vieux soldat qui veille sous la tente!

Moi, mon âme est fêlée, et lorsqu'en ses ennuis?
Elle veut de ses chants peupler l'air froid des nuits,?
II arrive souvent que sa voix affaiblie

Semble le râle épais d'un blessé qu'on oublie?
Au bord d'un lac de sang, sous un grand tas de morts?
Et qui meurt, sans bouger, dans d'immenses efforts.

 

Don Juan in Hell

english translation

Don Juan in Hell

original French poem

Don Juan aux enfers

Quand Don Juan descendit vers l'onde souterraine
Et lorsqu’il eut donné son obole à Charon,
Un sombre mendiant, l'oeil fier comme Antisthène,
D’un bras vengeur et fort saisit chaque aviron.

Montrant leurs seins pendants et leurs robes ouvertes,
Des femmes se tordaient sous le noir firmament,
Et, comme un grand troupeau de victimes offertes,
De rrière lui traînaient un long mugissement.

Sganarelle en riant lui réclamait ses gages,
Tandis que Don Luis avec un doigt tremblant
Montrait à tous les morts errant sur les rivages
Le fils audacieux qui railla son front blanc.

Frissonnant sous son deuil, la chaste et maigre Elvire,
Pr ès de l'époux perfide et qui fut son amant,
Semblait lui réclamer un suprême sourire
Où brillât la douceur de son premier serment.

Tout droit dans son armure, un grand homme de pierre
Se tenait à la barre et coupait le flot noir;
Mais le calme héros, courbé sur sa rapière,
Regardait Regardait le sillage et ne daignait rien voir.

 

The Dispossessed

english translation

The Dispossessed

original French poem

La Vie antérieure

J'ai longtemps habité sous de vastes portiques
Que les soleils marins teignaient de mille feux,
Et que leurs grands piliers, droits et majestueux,
Rendaient pareils, le soir, aux grottes basaltiques.

Les houles, en roulant les images des cieux,
Mêlaient d'une façon solennelle et mystique?
Les tout-puissants accords de leur riche musique
Aux couleurs du couchant reflété par mes yeux.

C'est là que j'ai vécu dans les voluptés calmes,
Au milieu de l'azur, des vagues, des splendeurs
Et des esclaves nus, tout imprégnés d'odeurs,

Qui me rafraîchissaient le front avec des palmes,
Et dont l'unique soin était d'approfondir
Le secret douloureux qui me faisait languir.

 

Charles Baudelaire

Charles Baudelaire (1821 – 1897) holds the most wide-ranging influence of the French Symbolist poets. A respected reviewer and critic whose translations of Edgar Allan Poe were much admired in his time, he died young, at only forty-six, but left behind a legacy of work at the center of which stands his masterpiece, the poems of Les Fleurs du mal, first published in 1857 to shock and acclaim.

 

Ned Balbo

Ned Balbo’s latest book, The Trials of Edgar Poe and Other Poems, was awarded the 2010 Donald Justice Prize and the 2012 Poets’ Prize. Lives of the Sleepers received the Ernest Sandeen Prize and a ForeWord Book of the Year Gold Medal; Galileo’s Banquet shared the Towson University Prize.

 

Ballade LXXXVI from Les Cent Ballades

english translation

Ballade LXXXVI from Les Cent Ballades

original French poem

Ballade LXXXVI

Jadis par amours amoient
Et les dieux et les deesses,
Ce dit Ovide, et avoient
Pour amours maintes destresses;
Foy, loiaulté et promesses
Tenoient sanz decepvoir,
Se les fables dient voir.

Et du ciel jus descendoient,
Non obstant leurs grans hauteces,
Et a estre amez queroient
Les haulz dieux pleins de nobleces;
Pour amours leurs grans richeces
Mettoient en nonchaloir,
Se les fables dient voir.

Lors si trés contrains estoïent,
Nymphes et enchanterresses,
Et les dieux qui lors regnoient,
Satirielz et maistresses
D'amours, qu'a trop grans largeces
Mettoient corps et avoir,
Se les fables dient voir.

Pour ce, princes et princepces
Doivent amer et savoir
D'amours toutes les adresces,
Se les fables dient voir.

 

Ballade LIX from Les Cent Ballades

english translation

Ballade LIX from Les Cent Ballades

original French poem

Ballade LIX

Par ces moustiers voy venir et aler
Maint amoureux gracieux et faitis,
Qui n'osent pas a leurs dames parler
Pour mesdisans qui trop sont ententis
D'eulx agaitier, dont les amans gentilz
S'en vont souvent qu'ilz n'en ont se mal non.
Et quant ilz sont de l'eglise partis,
Sont ilz aise ? certes je croy que non.

Et se bien ont, je croy qu'au paraler
Moult chierement il leur soit departis
Car, qui se veult selon amours riuler,
Il n'a mie pour soy tous bons partis.
Amours les tient subgez et moult craintis
Que de leur fait il soit aucun renom.
Ytelle gent, soient grans ou petiz,
Sont ilz aise ? certes je croy que non.

Mais des mauvais on ne se doit mesler;
Car bien n'en ont, ne mal, mais alentis
Ilz sont d'amer et ne scevent celer ;
Malicieux, decepvans et faintis
Sont, et mauvais et en leurs fais soubtilz ;
Mais ne leur chault s'ilz sont amez ou non.
Se bien leur vient a si pou d'apetis,
Sont ilz aise? certes je croy que non.

 

 

Ballade VII from Les Cent Ballades

english translation

Ballade VII from Les Cent Ballades

original French poem

Ballade VII

Ha ! Fortune trés doloureuse,
Que tu m'as mis du hault au bas!
Ta pointure trés venimeuse
A mis mon cuer en mains debas.
Ne me povoyes nuire en cas
Ou tu me fusses plus crueuse,
Que de moy oster le soulas,
Qui ma vie tenoit joyeuse.

Je fus jadis si eüreuse
Ce me sembloit qu'il n'estoit pas
Ou monde plus beneüreuse;
Alors ne craignoie tes las,
Grever ne me pouoit plein pas
Ta trés fausse envie haïneuse,
Que de moy oster le soulas,
Qui ma vie tenoit joyeuse.

Horrible, inconstant, tenebreuse,
Trop m'as fait jus flatir a cas
Par ta grant malice envieuse
Par qui me viennent maulx a tas.
Que ne vengoyes tu, helas!
Autrement t'yre mal piteuse,
Que de moy oster le solas,
Qui ma vie tenoit joyeuse ?

Trés doulz Princes, ne fu ce pas
Cruaulté male et despiteuse,
Que de moy oster le solas,
Qui ma vie tenoit joyeuse ? *

 

* Wikisource: Christine de Pizan, Cent Ballades, VII

 

Ballade IV from Les Cent Ballades

english translation

Ballade IV from Les Cent Ballades

original French poem

Ballade IV

Par envie, qui le monde desroye,
Est trayson couvertement nourrie
En mains faulz cuers, qui se mettent en voye
De mettre a fin leur fausse lecherie,
Et en leurs fais usent de tricherie,
Dont ilz prenent sur maint grant avantage,
En traïson, non pas par vacellage.

En grant pouoir fu la cité de Troye,
Un temps qui fu, sur toute seigneurie
Et la regnoit de ce monde, a grant joye,
En haulte honneur, fleur de chevalerie;
Qui par Grigois fu puis arse et perie,
Et Troyens pris et menez en servage,
En traïson, non pas par vacellage.

Alixandre qui du monde ot la proye
Si fu trahy; aussi grant desverie
Reffist Mordret a Artus par tel voye,
Dont maint dient qu'il est en faerie.
Le preux Hector, ou ot bonté florie,
Ne l'occist pas Achillès par oultrage,
En traïson, non pas par vacellage.

Princes, je dis, nel tenez moquerie,
Que l'en se gard de tel forsennerie,
Voire qui puet, car on fait maint domage
En traïson, non pas par vacellage.

 

Christine de Pizan

Christine de Pizan (1364 – c. 1430) was the daughter of the official astrologer to the French court, who gave her the same education that a son would have received. When her husband died of plague, leaving her a widow with three children at the age of 25, she began a career of writing, both prose and poetry, which marks her as a first European woman to support herself entirely by her pen.

 

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